FAVRE-VERAND Scarlett

Les facteurs économiques et la montée des défaillances

Les changements dans le domaine du credit management sont étroitement liés aux évolutions économiques. Dès les années 80, le nombre de défaillances d'entreprises en France commence à croître, un phénomène que notre experte a observé de près. Quand j'ai démarré chez Moulinex en 1983, il y avait 23 000 entreprises défaillantes en France. En 2008, on a atteint pratiquement 73 000 entreprises en défaillance.

Ce triplement des défaillances d’entreprises est un signe des bouleversements profonds que traverse l’économie française, notamment avec l’émergence de crises comme celle des subprimes en 2008. Cette explosion des défaillances a imposé des ajustements importants dans les pratiques de credit management pour minimiser les risques d’insolvabilité des clients.

La loi LME : un tournant décisif

Un autre changement majeur a été l'introduction de la Loi de Modernisation de l’Économie (LME) en 2008, qui a pour la première fois en France instauré des délais de paiement maximums. Avant cette loi, il n'était pas rare de voir des entreprises opérer avec des délais de paiement de 90 ou même 120 jours. La LME a limité ces délais à 60 jours maximum (ou 45 jours fin de mois), ce qui a bouleversé les pratiques des entreprises, particulièrement dans des secteurs comme le bâtiment où les longs délais étaient la norme. À l'époque, il y avait des délais en France de 90 jours de paiement, 120 jours. Et là tout d'un coup, on a réduit à 60 jours maximum et 45 jours fin de mois.

La crise des subprimes et ses répercussions

Simultanément à l’adoption de la loi LME, la crise des subprimes a frappé durement les marchés financiers, restreignant l’accès au crédit pour les entreprises. Les banques, confrontées à la crise, ont resserré les conditions d’octroi de crédits, obligeant les entreprises à s'adapter.

Face à cette situation, les entreprises françaises, souvent sous-capitalisées, ont dû se tourner davantage vers le crédit inter-entreprises, qui représentait alors deux fois plus que les crédits bancaires à court terme. Cette tendance a conduit à une transformation dans la manière de gérer les risques liés aux créances clients.

La culture du cash "Just on time"

Un autre aspect de l'évolution du credit management réside dans la culture du cash. Pendant longtemps, le milieu de bilan (trésorerie et poste client) était négligé dans la finance française, où l’on privilégiait le chiffre d’affaires et la marge comme indicateurs de succès, dans un contexte où il était facile d’emprunter avec des taux d’intérêt proche de 0% en attendant que les clients nous payent.  Cependant, l’accès au financement devenant plus difficile, les entreprises ont dû repenser leur manière de gérer leur trésorerie. La capacité à transformer la marge en cash n'était pas un sujet, puisqu'on avait recours au crédit bancaire court terme. Maintenant, c'est un enjeu central.

La gestion du cash “just on time”, où chaque euro de trésorerie est utilisé de manière optimisée, est devenue une nécessité dans de nombreuses entreprises. Cependant, cette transformation n’a pas encore touché toutes les entreprises, particulièrement en France, où beaucoup restent en retard dans l’adoption de ces pratiques.

L'après-Covid : un retour aux standards connus

La pandémie de Covid-19 a aussi marqué un tournant dans le domaine du credit management. Après une période d’incertitude, les entreprises retrouvent peu à peu les pratiques de gestion connues avant la crise. Cependant, les leçons tirées des événements récents, notamment l'importance de la trésorerie, continuent de modeler le comportement des entreprises. En sortie de Covid, tout revient un petit peu de façon... on n'est pas plus mauvais qu’au début de la crise, mais on revient dans des standards qu'on connaissait avant.

Conclusion

Ce deuxième épisode met en lumière les forces externes qui ont façonné l'évolution du credit management en France, avec des crises économiques et des réformes législatives qui ont obligé les entreprises à repenser leur manière de gérer les risques et les flux de trésorerie. Ce sont des leçons essentielles pour les acteurs économiques actuels, qui doivent continuer à s'adapter à un environnement en constante évolution.

Restez à l’écoute ! Cette série continue dans les semaines à venir, où Scarlett abordera les évolutions majeures du credit management, les défis actuels et l’impact des nouvelles technologies sur le secteur.

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