La culture commerciale d’un pays et de ses entreprises représente un ensemble d’us et coutumes sur la manière de faire des affaires et de les gérer.
Lorsqu’un usage devient un intérêt économique pour certains, il est souvent présenté comme une pratique incontournable et indispensable.
C’est parfois le cas de l’assurance crédit dont le caractère indispensable est très rapidement battu en brèche. En effet, plus de 99% des entreprises dans le monde n’utilisent pas cette solution pour sécuriser leur poste client. Elles ne s’en portent pas plus mal !
Quelles sont ces avantages et inconvénient ? Faut-il souscrire à ce type de produit ?
Avantages de l’assurance crédit
- Pour certaines entreprises, la gestion du crédit client n’est pas considérée comme une compétence clé de leur organisation. Elles sont frileuses sur ce domaine qui touche à la relation commerciale et préfèrent ne pas interagir directement avec leurs clients concernant leur solvabilité, la sécurisation des créances et la récupération des impayés.
- Certains assureurs sont excellents pour collecter de l’information financière et comportementale sur les entreprises et effectuent des analyses crédit de qualité. Ils disposent pour cela de relais internes (délégations régionales) et externes (accès à des informations confidentielles) dont les entreprises ne peuvent disposer qu’avec l’obtention de rapports financiers achetés à des prestataires spécialisés à un prix élevé.
La garantie accordée sur un acheteur est déterminée en fonction de son évaluation et constitue aussi bien une couverture du risque d’impayé qu’une information de qualité sur la solvabilité de son client.Ce principe est globalement vrai sur la France et certains pays de l’OCDE. Il l’est beaucoup moins sur d’autres pays où l’information financière sur les entreprises est moins présente sinon absente. L’approche des assureurs sur l’export est d’avantage macro-économique (risque pays, secteur d’activité) que micro (analyse de l’acheteur) et perd ainsi une partie de sa pertinence. - Afin de conserver son droit à l’indemnisation en cas d’impayé, l’assuré doit mettre en pratique les principes de la police d’assurance dans son processus de vente, ce qui est structurant pour l’entreprise et l’oblige à gérer ses créances « en bon père de famille ».
L’assurance crédit est donc intéressante pour les entreprises dont la gestion n’est pas optimale car elle contraint à respecter des fondamentaux de bonne gestion. Par exemple, l’impossibilité de continuer à livrer un client avec lequel des impayés ont été constatés. - Le coût de l’assurance crédit est relativement modeste et permet d’éviter le recrutement d’un ou plusieurs employés spécialisés dans le crédit management qui n’est pas le cœur de métier de son entreprise.
L’assurance crédit permet une externalisation de ces points gênants qui n’ont pas à être traités en interne. Les prestations qu’elle effectue ont en outre l’avantage d’être silencieuses (sauf pour les impayés).
En effet, l’acheteur n’est pas informé que son fournisseur a demandé une garantie le concernant pour couvrir son risque crédit.
Limites de l’assurance crédit
- Souscrire à une police d’assurance crédit revient dans la plupart des cas à déléguer la gestion du risque client à l’assureur. Un délai de paiement et un encours ne sont accordés à un client qu’en cas d’obtention d’une garantie de la part de l’assureur.
Cela pose un vrai problème car cette décision est stratégique pour le vendeur, l’enjeu étant la réalisation de la vente ou non. Elle doit donc rester en interne.
En effet, l’assureur a comme toute entreprise des contraintes qui lui sont propres et qui peuvent être contradictoires avec l’intérêt de leurs assurés. Externaliser la décision crédit client vers l’assureur n’est donc pas satisfaisant et peut être source de tensions internes à l’entreprise et avec le client potentiel. - Le risque crédit zéro n’existe pas. Chacun doit définir son niveau de tolérance de risque crédit en fonction de ses contraintes financières et enjeux commerciaux.
Les contraintes des assureurs sont énormes. Ils accordent des garanties sur des montants cumulés qui se chiffrent en centaines de milliards d’euros. Par conséquent, ils ne peuvent se permettre d’avoir une probabilité de risque significative sur les garanties accordées. Etant lourdement exposés quantitativement, ils ne peuvent l’être qualitativement.
Ils sont donc par nature restrictifs sauf sur les acheteurs non risqués. Cette prudence apparait souvent excessive à leurs clients qui auraient besoin de leur soutient pour développer leur chiffre d’affaires. - L’assureur est fréquemment amené à accorder plusieurs garanties sur une entreprise dans le cas où plusieurs de ses clients sont fournisseurs d’une même société. Le risque pour l’assureur correspond à l’addition des garanties accordées.
Il peut donc être restrictif sur une nouvelle demande de garantie parce que son cumul d’engagements a déjà atteint la limite acceptable avec cet acheteur. Dans ce cas, l’assuré n’obtient pas la garantie voulue non pas parce que son client n’est pas suffisamment solvable mais à cause des contraintes internes de l’assureur. - L’assurance crédit est une méthode silencieuse de couverture du risque crédit (l’acheteur n’est pas impliqué dans le processus).
Ce n’est pas un hasard si elle s’est imposée en France où il existe une certaine frilosité culturelle à aborder les questions de solvabilité et de conditions de paiement lors de la négociation commerciale.
L’inconvénient de cette approche est que l’obtention d’une garantie suffisante sur son client ne pousse pas à la négociation de conditions de paiement plus avantageuses (acomptes, étapes de facturation avant livraison…etc.) ou de garanties de paiement. L’assuré se contente des conditions standards car il se sait couvert par l’assureur, au détriment de sa trésorerie.Cette réalité s’oppose à la culture anglo-saxonne où l’échange d’informations financières et la négociation des délais de paiement sont au cœur de la négociation commerciale. Il en résulte des délais de paiement globalement plus courts et un désintérêt total envers l'assurance crédit (hors excess of loss).
Conclusion
L’assurance crédit n’est pas une solution miracle. Les entreprises assurées attendent souvent trop de leur assureur, notamment celles qui accordent un encours (ou une limite de crédit) que si elles obtiennent une garantie, ce qui est une erreur.
Ce faisant elles sont nécessairement déçue car l’assureur a ses propres contraintes qui peuvent parfois être contraires à l’intérêt de leur client.
Dans certains cas, elles risquent de brider leur développement commercial alors que ce n’est pas justifié.
La décision d’accorder un crédit à son client revient exclusivement au vendeur qui doit conserver en interne des compétences lui permettant de faire des arbitrages et d’argumenter auprès de l’assureur pour défendre ses demandes de garanties.
L’assureur doit être considéré comme un partenaire, important et souvent de qualité, mais qui n’est qu’un partenaire, pas le décideur des conditions de paiement accordées à ses clients.
Le recours à ce type de service est donc un choix de chaque entreprise qui doit dans tous les cas s'assurer de la cohérence de son organisation pour traiter les enjeux du crédit management : la gestion du risque, le recouvrement amiable et contentieux.
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En effet, mieux vaut avoir une bonne cohésion entre les services commerciaux et comptables Un bon service de recouvrement préventif et une bonne analyse du compte clients