Mazuir Bertrand
L'Expert Bertrand Mazuir Dirigeant P2B Solutions - My DSO Manager https://www.mydsomanager.com

La culture commerciale d’un pays et de ses entreprises représente un ensemble d’us et coutumes sur la manière de faire des affaires et de les gérer.

Lorsqu’un usage devient un intérêt économique pour certains, il est souvent présenté comme une pratique incontournable et indispensable.

C’est parfois le cas de l’assurance-crédit dont le caractère indispensable est très rapidement battu en brèche par les chiffres. On estime entre 200 000 et 300 000 le nombre d'entreprises qui utilisent l'assurance-crédit dans le monde, chiffre à mettre en perspective avec le nombre d'entreprises estimé de plus de 10 salariés dans le monde qui est de 110 à 120 millions. Ainsi, 99,75% des entreprises dans le monde n’utilisent pas cette solution pour sécuriser leur poste client. Elles ne s’en portent pas plus mal, gérant leur risque client de manière différente.

Le recours à l’assurance-crédit est donc un choix de gestion qui présente des avantages et des inconvénients et qui a des conséquences sur l’organisation de l’entreprise assurée.

Quels sont ces avantages et inconvénients ? Faut-il souscrire à ce type de produit ?

Avantages de l’assurance-crédit

La garantie accordée sur un acheteur est déterminée en fonction de son évaluation et constitue aussi bien une couverture du risque d’impayés qu’une information de qualité sur la solvabilité de son client.

 Ce principe est globalement vrai sur la France et certains pays de l’OCDE. Il l’est beaucoup moins sur d’autres pays où l’information financière sur les entreprises est moins présente sinon absente. L’approche des assureurs sur l’export est davantage macro-économique (risque pays, secteur d’activité) que micro (analyse de l’acheteur) et perd ainsi une partie de sa pertinence.

C'est bien la combinaison de l'évaluation des risques intrinsèques à l'entreprise, de son secteur d'activité, de la conjoncture du pays, voire mondiale, qui permet une juste appréciation.

L’assurance-crédit est donc intéressante pour les entreprises dont la gestion n’est pas optimale car elle contraint à respecter des fondamentaux de bonne gestion. Par exemple, l’impossibilité de continuer à livrer un client avec lequel des impayés ont été constatés.

Limites de l’assurance-crédit

Cela pose un vrai problème car cette décision est stratégique pour le vendeur, l’enjeu étant la réalisation de la vente ou non. Elle doit donc rester en interne. En effet, l’assureur a comme toute entreprise des contraintes qui lui sont propres et qui peuvent être contradictoires avec l’intérêt de leurs assurés. Externaliser la décision crédit client vers l’assureur n’est donc pas satisfaisant et peut être source de tensions internes à l’entreprise et avec le client potentiel.

Les contraintes des assureurs sont très importantes. Ils accordent des garanties sur des montants cumulés qui se chiffrent en centaines de milliards d’euros. Par conséquent, ils ne peuvent se permettre d’avoir une probabilité de risque significative sur les garanties accordées. Étant lourdement exposés quantitativement, ils ne peuvent l’être qualitativement.

Ils sont donc par nature restrictive sauf sur les acheteurs non risqués. Cette prudence apparaît souvent excessive à leurs clients qui auraient besoin de leur soutien pour développer leur chiffre d’affaires.

Il peut donc être restrictif sur une nouvelle demande de garantie parce que son cumul d’engagements a déjà atteint la limite acceptable avec cet acheteur. Dans ce cas, l’assuré n’obtient pas la garantie voulue non pas parce que son client n’est pas suffisamment solvable mais à cause des contraintes internes de l’assureur.

Ce n’est pas un hasard si elle s’est relativement imposée en France où il existe une certaine frilosité culturelle à aborder les questions de solvabilité et de conditions de paiement lors de la négociation commerciale. L’inconvénient de cette approche est que l’obtention d’une garantie suffisante sur son client ne pousse pas à la négociation de conditions de paiement plus avantageuses (acomptes, étapes de facturation avant livraison…etc.) ou de garanties de paiement. L’assuré se contente des conditions standards car il se sait couvert par l’assureur, au détriment de sa trésorerie.

Conclusion

L’assurance-crédit présente de multiples avantages de prévention et de sécurisation du poste client. Elle propose également des services de recouvrement des créances impayées et représente une source d'informations financières fiable sur les entreprises. Cependant, ce n’est pas une solution miracle. Les entreprises assurées attendent souvent trop de leur assureur, notamment celles qui accordent un encours (ou une limite de crédit) que si elles obtiennent une garantie, ce qui est une erreur.

Ce faisant, elles sont nécessairement déçues car l’assureur a ses propres contraintes qui peuvent parfois être contraires à l’intérêt de leur client.

Dans certains cas, elles risquent de brider leur développement commercial alors que ce n’est pas justifié.

La décision d’accorder un crédit à son client revient exclusivement au vendeur qui doit conserver en interne des compétences lui permettant de faire des arbitrages et d’argumenter auprès de l’assureur pour défendre ses demandes de garanties.

L’assureur doit être considéré comme un partenaire, important et souvent de qualité, mais qui n’est qu’un partenaire, pas le décideur des conditions de paiement accordées à ses clients.

Le recours à ce type de service est donc un choix de chaque entreprise qui doit dans tous les cas s'assurer de la cohérence de son organisation pour traiter les enjeux du credit management : la gestion du risque, le recouvrement amiable et contentieux.

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Commentaires
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Derniers commentaires
A.-.C.M.
Je suis tout à fait d'accord avec vous ,en effet, nous avions mis en place une assurance crédit pendant une année chose que nous avons résilié , le cout étant beaucoup plus important que le nombre de pertes que nous avons eu.
En effet, mieux vaut avoir une bonne cohésion entre les services commerciaux et comptables Un bon service de recouvrement préventif et une bonne analyse du compte clients
O.C.E.C.M.
Bravo pour cet article très intéressant sur l'assurance-crédit.

J'ajouterais que l'assurance-crédit trouve un nouvel atout avec l'arrêt de la publicité des comptes des petites entreprises, car les assureurs auront accès à cette information, contrairement aux fournisseurs d'informations financières.
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